Sauf que là, je ne peux pas.
Le trauma remonte car l’échéance arrive dans quelques jours et l’avocat (cette fois-ci ,c’est le mien…) a disparu. Cette affaire dure depuis des années et j’ai tant perdu… Et je n’ai jamais trouvé les règles du jeu. Car que faire ?
Toi, tu m’as tellement appelée en des circonstances bien plus graves que je ne révèle plus tellement je me demande chaque jour comment on a pu nous laisser dans une telle merde !
Le trauma prend tout qui fait que je n’ai pas la place d’écrire.
Toi, tu m’appelais ; « Au secours ! Ma personne de confiance, es-tu là ? » Et si je pouvais raconter d’où tu m’appelais et pourquoi ! O my god, sérieux ?
Et je disais : « Oui, je suis là. »
Je t’écoutais.
Sachant que pour vivre en ce monde, il est impératif d’être en relation avec une personne de confiance. Celle qu’on appelle à quatre heures du matin, celle qu’on appelle à l’autre bout du monde, en prison ou même au mitard,
dans le bureau du juge d’instruction,
ce numéro qu’on laisse à l’inspecteur en disant : « Prévenez-la. »
S’il m’arrive quelque chose.
Sauf que là, moi, je ne peux pas t’appeler.
Je suis seule face à la justice qui va me broyer.
Sauf que là, je ne parviens pas à écrire à propos du petit macaque alors que je suis dans la situation du petit macaque et que je voudrais écrire le plus beau texte qui soit sur lui ! C’est une des raisons pour lesquelles je retarde… Le petit macaque se blottit contre un mannequin douillet (qu’il prend pour sa première figure d’attachement) quand il a peur. Il se blottit avant de téter le biberon. Avant de se nourrir l’estomac, il a besoin de tendresse pour se calmer. Sans ça, nous ne pouvons pas nous développer.
C’est ça, la terreur de l’abandon face à la justice.
C’est pour ça que je suis venue dans le pire endroit du monde.
Mais on le sait, c’est officiel et prouvé, la société est de plus en plus violente parce que le lien se délite et c’est un cercle vicieux.
C’est pour ça que je suis venue, même derrière une vitre.
Le petit macaque sait.
Tu sais, c’est pas pour rien qu’ils parlent d’agneau sacrifié.
Je sais ce monde où on te punit pour une étreinte pour que tu ne guérisses jamais.
Car on sait, c’est se blottir contre l’autre qui répare.
Le petit macaque qui n’a pas de personne de confiance contre qui se blottir devient fou : il s’automutile et peut parvenir à se tuer.
Il suffit de séparer la personne de sa personne de confiance pour la détruire.
Et je sais que c’est normal de penser à la personne aimée on entre dans le bloc opératoire, c’est humain de vouloir serrer une main qui serre la notre en retour.
C’est ainsi que la vie a survécu.
Et tu le sais car tu l’as fait : m’appeler.
Comment ça serait si, moi, je te demandais de l’aide, de l’écoute… Oh je sais… Je l’ai fait y a quelques semaines…
C’est presque comique, non ?
13 avril 2023